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Publié par Noël N. Ngabissio (Mediatop1)

En République Gabonaise, les choses se déroulent plutôt à un rythme tout à fait satisfaisant pour la classe politique locale et la plupart des observateurs internationaux et démocrates donneurs de leçon. Alors que les trois pays d’Afrique sahélienne – Mali, Burkina Faso et Niger - qui ont, eux, connu plus tôt l’irruption des colonels et galonnés au pouvoir ces dernières années, le pays d’Afrique centrale, tout dernier à avoir délogé son Régime semi-monarchique, connu pour son climat politique somme toute pacifique, s’achemine sans à-coups vers la fin de la  "Transition" qui a suivi le renversement inattendu, le 30 août 2023, d’un Président-monarque visiblement diminué par un AVC, mais accro au pouvoir après deux mandats laborieux, Ali Bongo, (fils de son Père, l’ancien chef de l'Etat Omar Bongo Ondimba  resté pour sa par 42 ans à la tête du pays).

Le Patron du Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI), le Général Brice Clotaire Oligui Nguema, ancien commandant de la Garde présidentielle qui a dirigé ce "Coup de la Liberté", aura respecté son engagement sur un calendrier de deux ans pour redresser, régulariser le « fonctionnement démocratique » de l’Etat et normaliser la vie politique nationale.

Du dialogue national et inclusif à la  nouvelle Constitution…

Sur la voie de la normalisation donc, et la fin de sa Transition, le Gabon avait commencé par l'organisation d'un grand Dialogue national inclusif qui s’est tenu tout le mois d'avril 2024. Ces assises solennelles qui avaient regroupé dans la Capitale près de 600 délégués, au grand Stade d'Angondjé, avaient pour vocation de « réunir les Gabonais autour de la table » pour faire, sans concessions, l’autopsie de la situation (56 ans de règne sans partage d'une famille dans une République) et purger les miasmes de cette dictature tropicale qui fut basée sur le népotisme et la duplicité, la corruption et le détournement scandaleux du magot, pétrolier et forestier, du pays. Mais surtout de dessiner l’architecture et poser les fondations d’une "Nouvelle République". Près de 38 000 propositions y ont été examinées… au cours de diverses sessions et c’est un Evêque, Mgr Jean-Bernard Asseko qui en avait été désigné Porte-parole. C’est  encore un Evêque - Dieu reconnaîtra les Siens ! -, Mgr Jean-Patrick Iba Ba, Président de ce Dialogue National qui remettra solennellement, à la fin des assises, le volumineux Rapport des 1000 propositions retenues, au Président de la Transition, le Général Brice Oligui Nguema, au Palais, devant un parterre de dirigeants, de personnalités, de diplomates et de militaires… Le Général-Président a ensuite brandi devant l’assistance en liesse, cette nouvelle Bible Républicaine, après l’avoir embrassée. Et il a promis d’en appliquer les résolutions : « Toutes ces diligences confortent le grand rêve que je porte, celui de bâtir un tout autre Gabon. Je m’engage à mettre en place le comité de Surveillance et de Suivi de conclusion du Dialogue National inclusif ». Débutées le 2 avril, ces assises prennent fin  avec ces paroles : « Nous avons fait un pas de géant vers la restauration de notre édifice commun ». Voilà qui est dit.

Parmi les principales propositions retenues, il y a lieu d’insister sur l'idée de la  Préférence nationale, très différente cependant de celle, fameuse de l'Ivoirité bien connue en Afrique de l'Ouest : ainsi les candidats à la Présidence de la République devront être nés de père et mère gabonais, tous les deux. Merci pour ceux des Gabonais qui n'ont qu'un seul parent de cette Nationalité ! 

L'ancien parti au pouvoir, le Parti Démocratique Gabonais (PDG) créé par Albert Bernard (Omar) Bongo et dirigé par son fils et héritier politique, aura  été une cible particulièrement visée par le Dialogue National. Si tous les partis (anciens) seront suspendus, des enquêtes et des poursuites contre les leaders du PDG son envisagées et ses leaders seront frappés d'une inéligibilité : de trois ans pour ses présidents, vice-présidents, secrétaires, et membres du bureau politique, du Comité permanent et du Conseil des sages est adoptée.

Enfin, le Dialogue National a mis l'accent sur la politique migratoire qui doit être stricte dans le but de « stopper le flux ». Il y aura même une Charte des valeurs gabonaises à signer pour les nouveaux arrivants, en amont de toute naturalisation.

 Etape capitale: une Nouvelle Constitution, adopté par référendum le 16 novembre 2024. Et un Nouveau Code Electoral le 22 janvier 2025

Ces nouvelles règles et recommandations figurent désormais en bonne place dans la nouvelle Constitution adoptée par référendum le 16 novembre 2024. Celle-ci instaure on Régime présidentiel, sans Premier ministre. Mais me Chef de l'Etat est flanqué de deux Vice-Présidents : l'un chargé de la coordination du Gouvernement, le second pour assurer l'intérim du Chef de l'Et en cas d'empêchement ou de décès...

La durée du mandat présidentiel est ixée à sept ans (au lieu de cinq ans dans l'ancien Texte), renouvelable une seule et unique fois. Cet article ne peut en aucun cas être amendé pour revenir à la non-limitation des mandats.

Comme nous l'avons dit plus haut, seuls les candidats nés de parents gabonais (les deux) pourront prétendre à la Présidence. Ils devront en plus être âgés de 35 ans au moins et de 70 ans au plus. Ils devront n'avoir pas eu d'autre Nationalité dans les trois années précédant les élections présidentielles et avoir résidé au Gabon durant  ces trois années.

Toujours selon la nouveau Texte Fondamental et le nouveau Code électoral publié au JO du 22 janvier 2025, ni les enfants ni le (la) conjoint(e) d'un "Ancien" Président de la République ne pourront se porter candidats aux Elections Présidentielles. Exit donc Mme ... Sylvia Bongo (qui passait à tort ou à raison pour "la vraie" Cheffe de l'Etat à la place de son mari diminué par la maladie) ou son fils Nourredin Bongo Valentin qui "attendait" de prendre la succession de son père, étant l'héritier putatif du pouvoir de la Famille Bongo. Il était devenu en fait le vrai Patron du Parti PDG qui avait le privilège d'investir le Candidat à la Présidence. On peut penser que le Gabon en a fini une bonne fois de ces  velléités mafieuses, idées ou pratiques moyenâgeuses visant à perpétrer une "succession familiale" monarchico-républicaine, par le truchement d'élections bidonnées, tripatouillées, à la sauce Gabonaise (ou à la Togolaise).

Enfin, les candidats devront avoir au plus 70 ans tout net. Ce qui, de facto, écarte les deux précédents candidats qui avaient, en réalité, gagné les Présidentielles contre e sortant Ali Bongo et qui ont été brutalement spoliés de leurs victoires : l'ancien Secrétaire général de l'Union Africaine Jean Ping, né en 1942, gagnant des élections présidentielles de 2016 et le Professeur agrégé d'Economie Albert Ondo Ossa, en août 2023... Ce dernier a eu 70 ans il y a quelques mois, en juin 2024 !

Le Professeur agrégé Albert Ondo Ossa, privé de son éclatante victoire du mois d'août 2023 sur Ali Bongo, pourra-t-il se porter candidat ce 12 avril 2025 avec quelques mois au-dessus de la barre fatidique de 70 ans ?

Par ailleurs, le Ministère de l'Intérieur sera à nouveau chargé d’organiser les élections et non plus une obscure "Commission électorale...", malléable et corruptible. Il y a lieu de retenir également la fin du fameux bulletin unique qui avait fait polémique, on s'en souvient, sous Ali Bongo, à la veille des élections présidentielles d'août 2023 et que défendait alors, avec toute sa fougue et sa véhémence d'excellent communiquant, comme il sait si bien le faire, son éphémère Premier Ministre de l'époque, Alain-Claude Bilie By Nze. De même, pour entrer et siéger au gouvernement, il faudra être né Gabonais d'origine et avoir plus de 30 ans. Marié à un Gabonais ou une Gabonaise d'origine, pour être placé à la tête de certains ministères sensibles, comme l'Intérieur ou les Affaires étrangères. Exit donc la fameuse "Légion étrangère d'Ali Bongo", ces étrangers africains originaires de l'Ouest (Béninois comme ..., Sénégalais, ou Maliens) ou des Français et Britanniques..., que l'ex-dictateur Bongo  "naturalisait" à la va-vite pour intégrer ses amis étrangers au commandement du pays et surtout à la mangeoire.  On en connaît quelques exemples notoires catastrophiques : Maixent Accrombessi Nkomy, un aventurier béninois naturalisé et nommé en peu de temps Ministre, Directeur de Cabinet du Chef de l'Etat. On lui a reproché de mettre de la distance entre le Président Bongo et les membres du gouvernement. Il finira par rentrer chez lui au Bénin où il est devenu Chef traditionnel. Autre cas notoire, le Franco-Gabonais Brice Laccruche Alihanga, cadre financier né à Marseille, qui a travaillé à Libreville dans la Banque. Il est nommé Directeur de Cabinet du Président Bongo en 2017. En 2018 ce dernier est victime d'un accident cérébral. Durant la période de maladie et d'absence de celui-ci, il va assurer pratiquement l'intérim de la Présidence de la République sans mandat et dit-on, en profitera pour amasser une fortune importante. Vrai ou faux ? En 2019, après le retour de soins d'Ali Bongo prodigués au Maroc, Laccruche Alihanga sera arrêté pour détournements et emprisonné durant près de cinq années, jusqu'à 2024. Citons enfin le cas du naturaliste d'origine britannique Lee  White ... venu au Gabon étudier les forêts équatoriale et qui finira naturalisé Gabonais et nommé Ministre des Eaux et Forêts. Il faut dire que c'était la période "britannique" d'Ali Bongo qui s'éloignait de la France - parce qu'elle doutait de la sincérité des élections au Gabon (les Présidents Hollande puis Macron - et intégrait subrepticement le Commonwealth. Après le coup d'état, il a été reproché au Ministre Lee White son enrichissement personnel et des détournements importants. Xénophobie ou  précautions ? En tout cas, si les faits sont avérés, on comprend pourquoi ces restrictions sont apportées pour la naturalisation au Gabon et pour l'entrée au Gouvernement de Libreville. 

Le Président de la République, élu pour sept ans, dispose d'un Droit de Dissolution de l'Assemblée Nationale, une seule fois par mandat, après les deux premières années. Il devra auparavant consulter les Présidents de l'Assemble Nationale, du Sénat et de la Cour Constitutionnelle.

Pour prétendre à un portefeuille au Gouvernement, il faudra avoir fêté son trentième anniversaire et surtout être Gabonais de naissance, né de parents tous deux Gabonais.

La nouvelle Constitution met un accent tout particulier sur les Droits et Libertés : protection des libertés individuelles, séparation des pouvoirs, pour consolider la Démocratie au Gabon. Pourvu que ces très bonnes intentions prennent racine. Car on les a déjà lues dans l'ancienne Constitution que les Bongo, Père et fils ont cru devoir fouler aux pieds. Le Parlement , composé de deux Chambres, l'Assemblée Nationale élue pour cinq ans au suffrage universel et le Sénat, élu pour la même durée de mandat, au suffrage indirect, par les Conseillers Régionaux.

Autre point constitutionnel à retenir, l'article organisant la fameuse Cour Constitutionnelle, autrefois "propriété" de la Famille présidentielle. Elle est désormais composée de neuf membres nommés pour huit ans. Leur mandat est renouvelable une seule et unique fois. On se souvient de la Présidente de cette Cour dont nous tairons le nom, (dite Mme 3M), une Belle-Mère d'Ali Bongo, mère de plusieurs enfants d'Omar Bongo Ondimba), dont le mandat à la tête de cette institution fut renouvelé durant ... trente-trois ans ! un vrai record olympique...! Son rôle (de routine) consistait à juger des contestations électorales et valider les résultats des Présidentielles. La Cour se prononçait, comme par hasard, toujours et imperturbablement en faveur de la victoire du Candidat de la Famille ... Bongo Ondimba, en utilisant imperturbablement des arguties invraisemblables et invariables. Cette "Tour de Pise", comme on l'a surnommé, qui penchait toujours d'un seul côté, avait certainement besoin d'être redressée.

Par contre, une vraie nouveauté pour ce pacifiste pays : le Service militaire obligatoire est Introduit. Il concerne tous les citoyens. On voit que les "galonnés" sont passés par là. Et cela apporte une note de "Discipline" à la vie politique ... ?

Enfin la Langue officielle reste le Français. Merci Qui, pour  la Francophonie ?

Signalons que, sur le plan social et moral, la nouvelle Constitution a défini le Mariage comme une Union hétérosexuelle, interdisant ainsi tout mariage homosexuel. Il faut noter que l'ex-Président Ali Bongo avait dépénalisé l'homosexualité dans son pays, en 2020, considérant qu'il s'agissait de lois obscurantistes. Ce qui fut noté favorablement par la Communauté internationale (occidentale).

Revenons aux prochaines Présidentielles... et au Code électoral publié au JO le 22 janvier dernier

Les élections présidentielles se tiendront donc le 12 avril prochain. Avons-nous déjà des noms de quelques candidats ? Officiellement, personne ne s'est déclaré. Mais depuis quelque temps, il est notoire que d'aucuns se préparent. Activement. C'est, en effet, le mot qui convient. Entre autres, pour une personnalité qui depuis six bons mois, fait le Buzz dans les médias. Il a publié mi-septembre 2024 un ouvrage d'actualité politique : "Awu M'a Wu :  Oser l'Espérance pour un autre Gabon"En Fang, ce titre pourrait se traduire par : "Voici pourquoi je mène ce combat" ou encore par "Pourquoi on veut ma peau". C'est l'ancien et dernier Premier Ministre d'Ali Bongo qui vient de le publier. Ce leader Fang issu de Makokou, la capitale de la riche région minière du Nord-Est du Gabon, est bien connu : Alain-Claude Bilie By Nze.  (Explication  : Bilie, fils de Nze). Ce dernier patronyme Nze est très courant chez les Fangs au Gabon, au Cameroun comme en Guinée Equatoriale, voire au Congo-Brazza, et signifie, tenez-vous bien, le "Léopard" ou la "Panthère"). Je donne volontiers cette explication parce qu'un journaliste français, dans d'une interview à la Télé, lui a demandé pourquoi il possédait trois noms : Bilie, By, Nze... J'offre donc ici l'explication à ce brave confrère à qui cela semblait pas bien net. Etant moi-même de mère Fang du Cameroun et maîtrisant   parfaitement la langue Fang.

Revenons à ce cher Monsieur Alain-Claude Bilie By Nze. A 57 ans (depuis septembre dernier), il est et restera le dernier Premier Ministre d'Ali Bongo Ondimba. Cela vous marque un Homme, une vie et la carrière politique... d'après. Même si son passage à la tête du gouvernement gabonais a été plutôt furtif, comme dirai l'autre : il n'a duré que... six mois. Du 09 janvier au 30 août 2023. Brève Biographie de l'impétrant. Né en 1967, il se dirige d'abord vers l'Ecole de Police dont il sort diplômé. Mais il se tourne vers les Etudes Supérieures (Lettres) et entre à l'Université Omar Bongo de Libreville où il va créer le syndicat étudiant. Il y apparaît comme un militant qui affichant son opposition déterminée au Régime en place. Dans les années 1990, il est dans le sillage du fameux Père Mba Obame et son parti d'opposition radicale, le Rassemblement des Bûcherons, fondé en 1990. Quand A-C. Bilie By Nze est exclu pour rébellion de l'Université en 1994 par le Doyen Daniel Ona Ondo ...  (dans le Gouvernement duquel il entrera dix ans plus tard, en 2014 quand Ona Ondo devient Premier Ministre d'Ali Bongo : le monde est petit),  il  s'engage à fond dans la politique et devient peu à peu un membre influent des Bûcherons. Il suivra Mba Abessole, élu nouveau Maire de Libreville. II exerce à la Mairie comme Directeur de la Communication (un de ses 16 frères et soeurs, Roger Mebang Me Nze, est dans la Presse et la Communication). Il suivra son mentor dans les différents postes ministériels que Paul Mba Abessolo, après s'être réconcilié avec le Régime Bongo, va occuper comme Vice-Premier Ministre : Agriculture, Transports, etc, entre 2004 et 2009, année de décès d'Omar Bongo. C'est en 2006 que Alain-Claude Bilie Bi Nze entre au gouvernement du Premier Ministre Jean Eyegue Ndong comme Ministre délégué auprès du Ministre de la Communication et remporte les élections de Député dans la circonscription de Makokou, sa ville. Ministre délégué aux Transports il sort du gouvernement en 2008... Après la mort d'Omar Bongo Ondimba en 2009, il soutient la candidature du fils Bongo fidèle à l'alliance passée entre le Parti des Bûcherons et le PDG de la Famille Bongo, tandis que son mentor Mba Abessole est favorable à André Mba Obame, le concurrent redoutable, qui en fait, aurait remporté - déjà - cette élection contre l'HéritierAli Bongo cornaqué par le Président français d'alors Nicolas Sarkozy. Bilie By Nze perd son siège de député de Makokou, aux Législatives de 2011, n'ayant plus le soutien du RNB Bûcherons qu'il a quitté en 2010. Son challenger local victorieux, Emmanuel Issoze Ngondet, fera ... une très brillante carrière politique auprès d'Ali Bongo et deviendra Premier Ministre de 2016 à 2019, avant de tirer, hélas, sa révérence en 2020.

M. Bilie By Nze, éphémère Premier Ministre d'Ali Bongo en 2023, n'entend pas se laisser enfermer dans le rejet de la Famille Bongo. Il assume sa part de responsabilité dans le passif du Régime déchu... Mais pas plus.

 

A-C. Billie By Nze attendra quatre ans pour faire son retour au Gouvernement. C'est long pour un ambitieux. Entre temps, il se languissait comme Conseiller, Porte-Parole de la Présidence de la République depuis 2012 et a rejoint le Parti PDG d'Ali Bongo en 2013. Il rentre enfin au Gouvernement comme Ministre des Communications en 2015, poste d'où il va devoir défendre Ali Bongo en 2016 des accusations de falsifications des résultats des Présidentielles portées contre lui. On sait qu'en fait, le concurrent et ex-beau-frère d'Ali Bongo, Jean Ping, l'avait largement emporté cette année-là. Ce dernier subira les menaces et la violence déchaînée par Ali Bongo qui va ordonner des tirs à partir d'hélicos sur les jardins de son adversaire, ex-beau-frère, où s'étaient regroupés ses partisans déçus...

Bilie By Nze a le vent en poupe et changera plusieurs fois de portefeuilles jusqu'au poste de Ministre d'Etat, ministre des Affaires en juin 2019. C'est l'apothéose. Il va s'employer à se faire un nom sur le plan international. Car, il regarde plus loin : la maladie de Bongo et au-delà, etc... Quelques mois avant le coup d'état, il donnait de nombreuses interviews sur les chaînes Télés et dans divers médias, pour "vendre" les mérites du Régime Bongo qu'il honnit aujourd'hui, mais surtout consolider sa stature. On ne peut pas lui en tenir rigueur, car personne n'avait prévu si vite le crash... de l'aéronef des Bongo. Personne dans le gouvernement ou la classe politique.  Sauf, peut-être, un certain Général...

Depuis le coup d'état, l'ancien Premier Ministre-météore n'a pas chômé. Il a d'abord démissionne en avril 2024 de son poste de Deuxième Vice-Président du PDG où d'aucuns lui reprochaient d'ailleurs son "opportunisme politique", n'ayant jamais, disaient-ils, été un PDGiste sincère. Il a publié mi-septembre son ouvrage Awu Ma Wu pour se dédouaner et prendre ses distances avec le pesant passif politique de l'ancien Régime dont il a été un des thuriféraires.  Ensuite il annonce le 26 septembre 2024 la création de son nouveau Parti ou plutôt d'une "plateforme", Ensemble pour le Gabon, à laquelle pourraient s'arrimer d'autres partis. C'était pour lui l'occasion de lancer une violente diatribe contre la Transition militaire en cours au Gabon, qui ne serait que les contorsions douloureuses "d'un Régime politique moribond qui refuse de mourir".  [Sous entendu le Régime politique de la Famille Bongo, famille avec laquelle - c'est connu - le Général Oligui Nguema a des liens de sang par sa mère : pour l'ancien Premier Ministre, c'est la soeur aînée d'Ali Bongo, Pascaline Mferri Bongo, écartée du pouvoir les dernières années, qui serait l'inspiratrice du coup d'état, exécuté par le cousin Oligui Nguema qui dirigeait la Garde Présidentielle ! Ah, la Famille, Eh oui !].

Bilie By Nze a depuis, formellement démissionné depuis du Parti Démocratique Gabonais, PDG. C'était le 22 novembre 2024, par acte d'huissier (Maître Albert Abessolo Mezui, afin que nul n'en ignore s'il vous plaît). Il n'empêche, pour les Gabonais, Alain-Claude Bilie By Nze reste une figure marquante du parti des Bongo pour les quatorze dernières années. On attendait sa déclaration de candidature le 25 janvier dernier : il s'est contenté de prendre la parole pour finasser et rappeler qu'il a quitté définitivement le PDG, interdit de candidatures pour les Présidentielles prochaines. Il mûrit encore sa décision... et il remplit toutes les conditions exigées par la nouvelle Constitution qu'il avait recommandé de ne pas voter, et du nouveau Code électoral. Reste à savoir si cette récente démission du PDG le 12 novembre dernier le dédouane de ses 14 ans de présence dans la haute hiérarchie du PDG ?

Précisément, le Général Brice Clotaire Oligui Nguema qui avait organisé et exécuté si discrètement, la chute du Régime dictatorial du PDG, se contentera-t-il d'avoir joué les "Sauveurs" durant deux ans seulement pour rentrer à la caserne (!) ou "retourner tranquillement au village"  comme retraité de luxe ?(comme disait, avec son humour de félin tranquille, le Président camerounais Paul Biya, 92 ans, à propos de son propre... avenir !) On ne voit pas quelle place le Général pourrait occuper aujourd'hui dans le pays s'il décide de laisser le Palais du Bord de Mer à d'autres prétendants, civils ou pas civils. Il faut ici remettre sa phrase du 30 avril 2024 dans le contexte d'aujourd'hui : « Nous avons fait un pas de géant vers la restauration de notre édifice commun ». Comment imaginer qu'il plaque "la restauration de l'édifice commun", en cours, après seulement ce pas, fut-il "un pas de géant" ?

La Chute du Régime Bongo, pour les Gabonais est le "Coup de la Liberté". Le Général Oligui Nguéma reste le Libérateur...Et sa candidature aux présidentielles est sollicitée...

Depuis son arrivée au pouvoir, le Général est apparu à tous comme un homme décidé. Volontaire, mais pacifique. Rassembleur mais ouvert. Il n'a pas manifesté un quelconque ostracisme à l'égard de ceux qui ont condamné le coup d'état, ni écarté de la Transition ceux qu'on pouvait raisonnablement soupçonner d'avoir "collaboré" pour profiter, souvent grassement, des prébendes d'un demi-siècle de dictature. Il n'y a pas eu de chasse aux sorcières. Mieux il a laissé grandir dans le pays - au moins jusqu'aujourd'hui - une forme d'opposition "démocratique", un peu à la britannique. Et à de nombreuses reprises il a reçu ceux qui se disent opposés à plusieurs de ses décisions. Notamment économiques et à la Nouvelle Constitution et ont fait activement campagne contre le Référendum comme, précisément Alain-Claude Bilié By Nze, ... Et bien d'autres. Le Général a fait libérer les prisonniers politiques ou considérés comme tels. C'est sur le plan socio-économique qu'il a le plus travaillé ces  deux années : réhabilitation et assainissement des quartiers populaires des grandes villes comme Libreville (notamment le quartier de Nzeng Ayong...) et Port-Gentil, travaux de réfection des voies et bitumage des rues et routes inter-cités, modernisation en cours du Chemin de fer Transgabonais, long de 650 km : réhabilitation des gares, remplacement des traverses en bois par des métalliques, nouveaux wagons, etc), amélioration en cours de la fourniture d'eau et surtout d'électricité dans les grandes villes, voire les villes moyennes. Le Président de la Transition a effectué de longues tournées provinciales pour voir sur place les difficultés et recueillir les doléances des populations. Les dépenses faites pour moderniser le pays, ont d'ailleurs eu pour effet de gonfler la dette du Gabon et occasionné quelques difficultés de remboursement les mensualités... Mais on est certain que la réorganisation en cours des secteurs pétrolier, principal source de devises et forestier, permettra rapidement de revenir à une situation financière  normale.

A t-il fait tout cela et pris des risques "calculés" favorables à la reprise économique du Gabon et à une "respiration démocratique" du pays pour  laisser la main après deux ans à des politiciens qui, pour la plupart, ont déjà été aux affaires et se sont montrés incapables, d'une manière ou d'une autre, d'arrêter la dérive dictatoriale de la famille Bongo ?  D'ailleurs, interrogé dans la rue, le "petit peuple" dit qu'il ne se consolerait pas de son départ précipité,  même volontaire, dans deux mois, après seulement deux ans. Interrogées,  certaines personnalités locales nous ont affirmé que le départ du Général aurait quelque chose d'une "désertion", comme disent nos amis les militaires. Un ancien Premier Ministre, qui se tient un peu à l'écart de la vie politique depuis une dizaine d'années nous a donné son avis : "Il a suscité beaucoup, beaucoup d'espoir dans le pays, pour qu'il laisse tout tomber.. comme ça... Ce serait au nom de quoi ! Deux ans, évidemment ce n'est ps assez pour réformer et consolider ses réformes". Nous espérons qu' Oligui Nguema prendra la bonne décision".

 
Article rédigé par Noël Ngabissio
Directeur de la Rédaction -  Afrique Horizon Mag
 
Cet article sera complété si des nouveaux candidats se déclarent et il restera disponible jusqu'au 15 février 2025.

(1)  - A noter ce 04 fevrier 2025 : le Général guinéen Mamadi Doumbouya a annoncé à Conakry des élections présidentielles et la fin prochaine de la Transition militaire dans son pays, pour cette année 2025, sans préciser toutefois les dates. Nous rapidement reviendrons sur le sujet...